L'orientation client exige une recherche et une planification approfondies pour comprendre les souhaits, les besoins et les réalités des individus, notamment en matière de finances. En Inde, Sistema.bio adopte une approche centrée sur le client pour proposer aux femmes rurales des biodigesteurs à des prix abordables, grâce à des crédits carbone.
L’orientation client est particulièrement cruciale pour les femmes car elle aborde également les nombreuses intersections concurrentes de leur vie, y compris les normes sociales sexistes qui ont un impact sur l’autonomisation économique des femmes. Grâce à une étude client et une conception réfléchies, les efforts d'inclusion financière peuvent aborder divers points clés, notamment le genre, le climat et l'inclusion financière. Les parcours d'intégration, d'adoption et d'utilisation peuvent nécessiter un temps et une énergie considérables pour les femmes déjà surchargées de tâches ménagères et agricoles. Cependant, une approche centrée sur le client dépasse le cadre d'un seul prestataire de services financiers ou d'une seule entreprise et implique souvent la coordination de plusieurs partenaires afin de garantir un processus fluide pour les utilisateurs finaux, ce qui n'est pas chose aisée lorsque les partenaires ont des priorités concurrentes.
Bien que difficile, l'orientation client peut aider les prestataires à ouvrir des perspectives aux femmes moins connectées financièrement, numériquement et économiquement que les hommes. Comprendre leur réalité et créer des produits et services adaptés à leurs besoins ouvre un marché porteur.
Sistema.bio , qui fait partie de la première cohorte d' ABERA , est une entreprise de biodigesteurs en Inde qui permet aux ménages ruraux de transformer les déchets organiques (bouse de vache) en biogaz renouvelable (gaz de cuisson propre) et en engrais organique, avec environ 75 à 80 % des biodigesteurs gérés par des femmes.
L'un des services de Sistema.bio s'adresse aux ménages travaillant dans le secteur laitier, qui regroupent cinq acteurs clés : les entreprises (qui sponsorisent le projet), Sistema.bio (le partenaire technologique), Gold Standard (le registre carbone qui valide et enregistre les projets, les audite par des tiers et délivre des crédits que les entreprises retirent pour atteindre leur objectif de durabilité), le réseau laitier pour atteindre les agriculteurs à grande échelle et, au cœur de l'action, l'agriculteur lui-même. Comme illustré ci-dessous, Govind Dairy, partenaire du réseau laitier, recommande à Sistema.bio les agriculteurs avec lesquels il travaille et qui, selon lui, pourraient bénéficier d'un biodigesteur. Sistema installe ensuite le biodigesteur et certifie les crédits carbone de chaque ménage auprès de Gold Standard, les utilisant pour subventionner les biodigesteurs à hauteur de 60 à 90 %, selon le marché des crédits carbone. Les 10 à 40 % restants (environ 60 à 140 USD) sont prêtés aux agriculteurs par Govind Dairy, les remboursements étant directement prélevés sur leurs mensualités de lait. Les agriculteurs remboursent généralement le coût du biodigesteur en un à trois mois. Sistema.bio verse à Govind Dairy une commission de promotion pour chaque biodigesteur vendu, et assure également son rôle de rassembleur auprès des agricultrices et de fournisseur d'informations continues.
La Fondation Govind (branche philanthropique de Govind Dairy) a été le fer de lance de ce programme d'autonomisation économique des femmes, qui utilise une approche de financement mixte et propose aux agricultrices des solutions rentables. En travaillant en étroite collaboration avec les agricultrices et en co-développant des solutions créatives, Govind a pu optimiser les ressources existantes pour la croissance et le développement des agricultrices. Étant donné que les femmes sont actives dans 80 % des ménages d'agriculteurs laitiers, la fondation gère des programmes qui leur sont spécifiquement destinés. Govind offre une image de confiance, des formations régulières par l'intermédiaire de son comité de vulgarisation, une exposition aux nouvelles pratiques agricoles et a même proposé des services financiers tels que des prêts d'urgence pour la santé contre paiement du lait. Cette valeur est reconnue par les agricultrices et agriculteurs grâce à leur fidélité : plus de 75 % des agricultrices et agriculteurs laitiers vendent leurs produits à Govind, en grande partie grâce aux services et au soutien supplémentaire qu'elle leur offre.
Grâce à ce système, si les agriculteurs sont au cœur de l'équation, ils n'ont besoin d'interagir qu'avec un seul partenaire. Ils sont conscients de la valeur de leurs crédits carbone, mais celle-ci est directement déduite du coût de leur biodigesteur, qui, après seulement quatre semaines de remplissage, leur fournit 3,5 heures de biogaz par jour et d'engrais organique, permettant ainsi à un ménage moyen d'économiser 7,5 % de ses revenus annuels. Au-delà des économies, ce modèle offre également d'autres avantages, notamment :
Du point de vue du prêteur (Govind Dairy), le recouvrement des remboursements de biodigesteurs auprès des agriculteurs est simple : le prélèvement direct ne nécessite ni relance, ni défaut de paiement, ni frais administratifs supplémentaires. Govind reçoit également le paiement directement sur son compte bancaire tous les 10 jours pour le lait qu'il fournit.
Pour que l’orientation client fonctionne, les utilisateurs doivent avoir confiance dans le système. Si les agricultrices ne font pas confiance à leurs partenaires, il est difficile d'imaginer comment elles adopteront les nouvelles technologies et adapteront leurs comportements. Govind Dairy offre un excellent exemple de modèle centré sur les agricultrices, concevant des produits financiers et des interactions qui répondent véritablement à la situation financière et plus large des agricultrices. Le partenariat d'ABERA avec Sistema.bio va maintenant passer à la phase suivante : nous analyserons les résultats de cette évaluation initiale et collaborerons avec Sistema pour mettre en œuvre certaines des recommandations qui en découlent. À l'avenir, nous explorerons des questions telles que :
Alors que nous poursuivons ce voyage, il est clair que l’avenir des services financiers réside dans des modèles comme ceux-ci, où comprendre et répondre aux besoins spécifiques des femmes n’est pas seulement une bonne éthique, mais aussi une bonne pratique commerciale.
Cet article a été publié pour la première fois sur le site Web du CGAP